Cinébdo – 2018, N°38 (Les Compères, La Grande Muraille, À la poursuite de demain, Landru)


Désolé de n’avoir rien publié d’autre cette semaine, mais je devrais pouvoir entrecouper mes critiques cinéma par des choses plus variées bientôt !

Ce format consiste en une compilation de mes critiques sur les films que j’ai vus dans la semaine.

Sommaire cliquable
Les Compères (Jacques Veber, 1983)
La Grande Muraille (Yimou Zhang, 2016)
À la poursuite de demain (Brad Bird, 2015)
Landru (Claude Chabrol, 1963)


(J’écris par passion de l’écriture et de mes sujets, mais c’est encore mieux d’avoir l’impression de ne pas être seul. Si vous aimez cet article, cliquez sur le bouton « j’aime », laissez un commentaire, voire partagez si vous en avez envie. Sinon, vous pouvez juste lire, c’est bien aussi. Merci beaucoup !)


Image d’en-tête : À la poursuite de demain ; films 225 à 228 de 2018

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Lundi : Les Compères

(Jacques Veber, 1983)

« Thématique : Gérard Depardieu »*

Veber, Depardieu, Richard, un triumvirat simple et si peu de sophistication qu’on en pâlit. Mais est-ce vraiment nécessaire quand se produit le miracle d’un drame joué avec légèreté, quand on devine les sourires accidentels qui se cachent derrière chaque scène ? Les compères n’ont pas grand chose, mais le spectateur n’a pas non plus besoin de grand chose : de l’inattendu, et l’on s’esclaffe, parfois par surprise plus que par amusement. On a droit à la vertu d’acteurs moins théâtraux, plus sincères et fondamentalement comiques, car le duo Richardieu fonctionne grâce à la façon qu’il a de foutre un coup de pied dans la solide fourmilière du convenu, même si cela doit se faire avec un trigger aussi nul (pour réfèrence : le personnage de Anny Duperey se met dans l’idée de faire rechercher son fils en fugue par deux de ses anciens amants à qui elle fait croire séparément qu’ils sont son père). C’est un film typique de la transition des années 1980 par laquelle Depardieu est passé, mais avec l’inconvénient d’un scénario moins sophistiqué avec beaucoup de voies sans issue. On est dans du vaudeville pur et simple, mais au moins cela sert-il un « higher purpose » : un objectif supérieur, la distraction… et ça marche.




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Jeudi : La Grande Muraille

(Yimou Zhang, 2016)

« Hors-thématique »*

C’est l’heure du popcorn, voici un film de divertissement qui carbure aux dollars comme on les aime… ou pas. Et puis, des dollars ou des yuans ? Film le plus cher de l’histoire du cinéma chinois, il se passe sur la Grande Muraille, où l’équipe du tournage n’a pas mis un pied. Ouaip, l’imagerie informatique va avoir du boulot, parce que l’intro bourrée de scènes à cheval dans de magnifiques paysages naturels nous laisse augurer par son rythme gallopant qu’elle ne va pas tenir longtemps. Si fait, nous voilà embarqué dans un univers qu’on connaît bien, ou le monumentalement classe est au prix du monumentalement n’importe quoi (et je crains que les extrêmes ne se soient que plus tendus ces dernières années).

Les langues sont plutôt bien gérés ; deux étrangers en Chine ? On leur parle chinois… sauf que bien sûr, ce bon vieux Willem Dafoe a enseigné l’anglais aux deux protagonistes chinois principaux, parce que c’est plus commode. Heureusement, on a une excuse sur laquelle décharger le spectacle des combats : le scénario est basé sur une légende chinoise, et partant de là, ça justifie pas mal de choses… mais PAS les ralentis abusés qui nous font passer du Cirque du Soleil à un jeu vidéo, et PAS les femmes guerrières ou générales. Je ne crois pas que l’Histoire me rétorquera que les femmes ont jamais eu une place centrale dans les combats (j’ai bien dit « combats », pas « guerres »).

La distraction bat son plein, nous coupant les idées neuves comme l’envie d’en trouver. Dommage par contre que les effets spéciaux ne supportent pas la charge de travail de ces fausses cascades grandiloquentes et de ces monstres qui grouillent partout. On se serait attendu à ce que la technologie avance plus vite, surtout avec 135 millions (et c’est pas des yuans).


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Vendredi : À la poursuite de demain

(Brad Bird, 2015)

« Hors-thématique »*

On connaît Brad Bird pour Ratatouille et les Indestructibles, Mission Impossible aussi… Et ça fait quelque chose de le voir entrer de nouveau dans le cinéma de chair et d’os. Content de voir qu’il cultive encore l’optimisme et le rêve au point de faire de Tomorrowland – un film dont le titre aurait mérité qu’on ne le traduise pas – un rêve à part entière, mêlé de conte dans sa première partie insouciante.

On ne sent pas venir la rupture un peu violente avec la seconde partie, mais c’est voulu pour introduire l’utopie. L’utopie… En ça, Tomorrowland est très intéressant, car ce n’est pas un film qui tient de l’utopie, ni de la contre-utopie ni de la dystopie… C’est un film contre-dystopique, comme s’il accédait à un niveau supérieur de ces concepts. Le personnage principal de Britt Robertson mêle assez bien la naïveté à l’intelligence, même si son rôle est engoncé dans les limites convenues du « destin extraordinaire ». En fait, tous les personnages sont absolument excellents, et l’alchimie qui les lie entre eux est de la plus belle qualité.

Toujours un peu comique, le bébé de B.B. n’abuse de rien : ni de la légèreté, ni du grandiose (bon, d’accord, un peu), ni de la S.F.. Un regret : la contre-dystopie n’est pas menée au bout, mais au moins la trame tient-elle le coup jusqu’à la fin (et je pense que c’est là que mon opinion diverge de la plupart des avis sur le film). Bien sûr, l’œuvre va trop loin pour espérer être excellente ; elle se base trop sur l’émotion forte, alors qu’elle aurait pu se ménager de la place pour un rythme plus serein et profond. Et puis il faut bien avouer que jouer avec le passé quand on est un film sur le futur, c’est une erreur un peu grossière, et le résultat ne manque pas d’être grossier à son tour : une fusée sous la Tour Eiffel, sérieusement ? Ça, et d’autres faiblesses de cohérence inévitables quand on fait mumuse avec l’espace-temps.

Mon avis sur Tomorrowland ressemble un peu à celui que j’avais eu de Jupiter Ascending des sœurs Wachowski : ce sont des films mal-aimés pour lesquels j’éprouve une tendresse compréhensive, comme s’ils étaient arrivés trop tôt. Et je continuerai d’apprécier la lisseur de leur ambiance. Espérons juste que leur propos ne vieillisse pas trop vite.


 


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Dimanche : Landru

(Claude Chabrol, 1963)

« Hors-thématique »*

Ah, la France des premières décennies du XXème siècle et les procès. Pas de star pour le personnage principal, mais un premier rôle pour Charles Denner que l’on dote d’une barbe bien taillée et de bonnes manières. Dommage qu’on puisse être si prompt à qualifier la première de bleue et à rapprocher les secondes d’une affectation guindée ; Denner incarne la fascination périmée de la France pour ses plus fieffés malotrus, cherchant cahin-caha à reproduire le fruit propice du meurtre aux feuilles de choux excitées par la guerre.

Mais comme la voix de son interprète qui ne sait pas où donner de la tête (coupée), le film ne sait pas ce qu’il veut être. Tout le monde a bien sa petite moustache, son couvre-chef, et son assortiment d’expressions fânées, mais le genre est plus indistinct encore que la prestation théâtrale ; reconstitution historique, remise au goût du jour, passage de l’histoire (réelle) de Landru à l’amidon du scénario commercial, parodie cherchant l’humour dans ses plus sanglants recoins… Contrairement à cette phrase, tout cela ne rime à rien.

On trouvera son compte dans le tribunal qui sert de conclusion, même si là non plus, on ne sait pas ce qu’est le propos ; la beauté des plaidoiries est là, mais les joutes oratoires préfèrent se réfugier derrière les raccourcis du montage que de faire monter la mayonnaise. Laquelle manque, tout comme ma métaphore de subtilité, à ces salades arrosées d’un mystère trompeur et insatisfaisant.



* Les barèmes montrent le ressenti et l’appréciation critique. Entre guillemets est indiquée la thématique.  Plus de détails ici.

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