Cinébdo – 2018, N°20 (À la rencontre de Joe Black ; Jupiter: Le Destin de l’Univers ; Mad Max ; Mad Max: Fury Road)


Ce format consiste en une compilation de mes critiques sur les films que j’ai vus dans la semaine.

Dans l’hebdo de cette semaine :

  • À la rencontre de Joe Black (Martin Brest, 1998) ;
  • Jupiter: Le Destin de l’Univers (les Wachowski, 2015) ;
  • Mad Max (George Miller, 1979) ;
  • Mad Max: Fury Road (George Miller, 2015).

Note critique moyenne : 5,5/10 ; note appréciative moyenne : 5,5/10. Année moyenne de sortie : 2002.


(J’écris par passion de l’écriture et de mes sujets, mais c’est encore mieux d’avoir l’impression de ne pas être seul. Si vous aimez cet article, cliquez sur le bouton « j’aime », laissez un commentaire, voire partagez si vous en avez envie. Sinon, vous pouvez juste lire, c’est bien aussi. Merci beaucoup !)


Image d’en-tête : Jupiter: Le Destin de l’Univers ; films 114 à 117 de 2018

c7r2*

Mardi : À la rencontre de Joe Black 

(Martin Brest, 1998)

Voyez aussi la critique de mon ami Linedwell →ici.

[Spoilers] À la rencontre de Joe Black… Un film extraordinaire, non parce qu’il sort des frontières connues du cinéma américain, mais parce qu’une force (le réalisateur, les producteurs peut-être ?) le fait carrément décoller de la planète cinéma.

Le film est malheureusement aussi facile à spoiler qu’il est compliqué d’y rentrer. Dans une bourgeoisie dépeinte avec le luxe d’un cinéma centré sur les lumières, Anthony Hopkins joue un richissime chef d’entreprise qu’on ne saurait situer sur la jauge habituelle du bien et du mal. Et pour une fois la durée du film (trois heures) n’est pas un gage de qualité et d’audace, mais bien de précision et d’ultra-réalisme. Un réalisme qui ne sera distordu que par la présence de la Mort au rang des personnages. Et diantre, que le temps est long ! Les échanges entre les personnages sont détaillés et le réalisateur Martin Brest aime à exploiter le blanc, ce qui a rendu le film insupportable à plus d’un spectateur.

La maîtrise de ce blanc dans les conversations rend le film maître au moins d’une chose : le dialogue, dans son sens étymologique qui implique deux personnes. Les face-à-face de Hopkins avec Brad Pitt seraient légendaires si le film avait remué terre et mer comme il aurait dû… Pourtant force est d’admettre qu’il est très peu distrayant. C’est un drame américain, mais son essence efface la frontière atlantique qui coupe l’Occident en deux au niveau de ce genre ; c’est la réconciliation avant l’heure des drames européens des années 2000 avec la ligne droite tracée par les collègues d’outre-océan.

On peut relever la petite faiblesse scénaristique qui veut que tout soit déjà en place au début de l’histoire, mais on peut aussi la mettre sur le compte de la longueur du film, qui nous présente déjà beaucoup de choses pour selon qu’il est d’une lenteur quasi-orientale.

Il s’agit en tout cas d’un recyclage incroyable de Hopkins dans la peau d’un homme d’affaires, dont les affaires en question sont disséquées avec l’impitoyabilité d’un naturel oppressant, dont le contrepoids constitué par le prétendu « méchant » de Jake Weber répond avec un peu trop de cliché. Un excellent film, rarement faible, pour qui le supporte.


c3r6*

Mercredi : Jupiter: Le Destin de l’Univers 

(les Wachowski, 2015)

Jupiter Ascending était la grande promesse SF des sœurs Wachowski après Cloud Atlas trois ans auparavant. Et si ce dernier était épatant, l’autre n’en a pas vraiment hérité la qualité.

Un peu à l’étroit dans deux petites heures quand Cloud Atlas en prenait trois et la série Matrix six et demi, les réalisatrices nous poussent à rentrer dans le film comme s’il avait tout un univers dont nous aurions été au courant de l’origine – d’ailleurs le script était long de six cents pages. Ce manque d’émancipation se ressent aussi dans l’inspiration très forte prise à la mini-série Dune de John Harrison ; l’indigeste nom « Abrasax » a vite été remplacé par « Atréides » dans mon esprit, en plein visionnage. Les dynasties, les guerres, le caractère des personnages, les accords majeurs de ce space opera m’ont tous rappelé l’univers de Dune. Difficile à avaler quand on essaye d’absorber une œuvre dite « originale ».

L’introduction, outre cette confiance en des antécédents inexistants, marche vaguement bien. On nous y révèle une intégration des effets visuels dans les décors réels dans un goût nouveau, qui ne tardera pas à imprégner le film du talent caméristique des Wachowski… Mais c’est insuffisant. Les personnages, les vaisseaux et les décors (tous dunesques) participent à rendre l’œuvre supportable, car leur « redesign » futuristique est un gène commun avec Cloud Atlas ; on est vraiment transporté. Jusqu’à ce que certains personnages s’avèrent tout à fait ridicules (le pilote-éléphant m’a fait sursauter de mauvaise surprise), le scénario criblé de petites contradictions (résultat de la compression du scénario peut-être ?) et les tentatives d’humour oiseuses et plaintives. « Space cops ? Sure » : « des flics de l’espace ? Bien sûr » ; cette phrase de Mila Kunis résume bien la résignation dont le spectateur doit faire preuve pour aborder l’histoire sereinement. L’actrice est bien loin de sa prestation dans Black Swan ; dans Jupiter Ascending, elle est réduite à l’état d’une top model fluette et bilingue, que seul le dernier adjectif fait différer de l’héroïne de Divergente, mais on se demande si le scénario n’a pas été adapté du fait du bilinguisme de l’interprète de toute façon…

En fait, le défaut principal du film se révèlera être l’absence totale d’ambiance. D’où la vulnérabilité aux assimilations avec d’autres univers et le manque d’accroche. Il y a de l’idée quand les limites sont rendues ambiguës entre la morale et les mœurs (qui, étant extraterrestres, sont par définition difficiles à appréhender) : « to live is to consume » : « vivre, c’est consumer ». Pourquoi pas ? On a vu de pires gimmicks. Il est également intéressant que la méchanceté soit souvent du pur égoïsme, quoique la méchanceté véritable nous y raille aussi de toute la hauteur de ses clichés. Mais le film est aussi stupidement irréaliste. On peut survivre dans le vide spatial ? On peut construire une base sur Jupiter ? C’est censé être une planète gazeuse, mais bon… On peut se téléporter et on ne nous dit même pas comment ? On peut faire oublier le passé récent aux Terriens qui viennent de voir des aliens ? Pitié, ce cliché…

Au final, Jupiter Ascending est de la SF bien grasse, trop grasse, qui nous reste sur l’estomac. Il n’a même pas le petit détonateur qui nous fait aimer le retour à la normale dans la vie de l’héroïne après ses péripéties. Il y avait autant de moyens de la faire moins bling-bling qu’il y a de kilomètres entre la Terre et Jupiter (591 millions). L’œuvre est la preuve par l’exemple qu’il est dangereux de ne pas faire mourir Sean Bean.


c5r6*

Jeudi : Mad Max

(George Miller, 1979)

Mad Max commence de se faire vieux. Il est sorti en 1979 et il faut commencer de faire preuve de beaucoup d’indulgence pour le temps passé depuis lors. Mais ça ne suffit pas tout à fait.

À l’instar de la voiture apparemment formidable – pour ce que j’en sais – pour laquelle Mel Gibson s’éprend, tout démarre bien dans le film. Le spectateur est rapidement forcé d’être du côté de la police, gentiment poussé qu’il est dans leur camp par les bons liens entre les personnages. Des liens construits plus vite que les voitures sont défoncées à grands coups d’un budget « démolition » pas trop dégueu. La douce caricature de la police, motivée dans les déserts par la soif de whisky et de vitesse, prend toute sa dimension dans le fond sonore de la radio policière, que tout le monde ignore avec zèle pendant qu’une voix, robotique tant elle est monotone, débite des avertissements et relaye des informations avec des intonations de propagandiste. Cela achève de nous faire les alliés de la police, car on n’y comprend rien, mais eux s’en foutent, donc ça revient au même.

Et puis surtout, la route vieillit bien. On ne peut pas en dire autant du caractère des personnages qui émet parfois une vague lueur de charisme sans jamais vraiment réussir à séduire. Malgré cela, le film prend la peine de fabriquer un beau couple avec les personnages de Mel Gibson et Joanne Samuel. C’est la dernière poussée du film dans la qualité. Est-ce que son élan est suffisant pour arriver à la fin ? Il le serait, si elle n’était pas un mur de soudaineté qui nous interrompt en plein processus d’identification aux protagonistes. Avant quoi le film tire pourtant en longueur tellement son dénouement est évident à l’avance ; il a beau user de sobriété dans la représentation de l’ébriété de ses sujets, il faut vraiment être au courant que le budget était serré, et que la bande de motards était authentique, pour ajuster notre opinion. Quand à la tentative de dystopie, je n’en ai rien vu ; j’en ai oublié que c’était tourné en Australie et je me suis vu dans le far west de 1979 plutôt que dans celui de Le Livre d’Eli.

Il est dommage que l’histoire s’autodétruise ainsi, mais il y fort heureusement moyen de rester sur un dernier parallèle, qui est la confusion des cris des corbeaux avec ceux, de rage ou de douleur, des humains. Amputé de sa fin, ça reste un bon film de toute manière.


c7r8*

Vendredi : Mad Max: Fury Road

(George Miller, 2015)

Voyez la critique détaillée ici.



* Les barèmes montrent le ressenti et l’appréciation critique. Entre guillemets est indiquée la thématique.  Plus de détails ici.

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